Colloque
ASSER (*)
Lors du colloque de l’Institut ASSER, tenu à La
Haye du 13 au 16 octobre 2004, de nombreux universitaires
reconnus en droit européen ont largement réfléchi
aux conséquences d’un rejet par un pays
du projet de traité constitutionnel. Ce
scénario
fait pleinement partie du débat. Tous les intervenants ont
considéré qu’il
s’agissait d’une hypothèse réaliste.
Aucun n’a présenté la non-ratification
par un ou plusieurs pays comme une catastrophe. Au
contraire, plusieurs interventions se sont attachées à présenter
les différentes “portes de sortie” possibles,
qui n’ont pas nécessairement des conséquences
négatives. Selon Joseph H.H. Weiler (New York
Law School), il y aurait même un scénario
de sortie de crise gagnant/gagnant. Pour lui, « le
traité de Nice fonctionne actuellement » et,
si le projet de constitution n’est pas ratifié par
tous, « ce ne sera pas la fin du monde ».
Pour Bruno de Witte (IUE
de Florence), il existe des portes de sortie en cas
de “crise de ratification”, étant
entendu que 2 possibilités apparentes sont irréalisable
s:
- l’entrée
en vigueur partielle de la Constitution
seulement pour certains pays, qui resteraient
par ailleurs liés par les anciens traités
;
- l’exclusion de l’UE des pays n’ayant
pas ratifié le projet : ce scénario
est juridiquement impossible, car le
groupe des pays ayant ratifié le projet n’a pas le droit de
modifier les droits des autres pays sans leur accord,
en les excluant de l’UE.
Pour lui, les “portes de
sortie” sont :
1-
Le scénario “Nice plus”, qui
consiste à prendre acte de la non-ratification
de la Constitution. Les anciens traités (CE
et UE), modifiés par Nice, s’appliquent. Dans ce cadre, toute progression n’est cependant
pas bloquée: deux possibilités existent
:
- soit l’application
informelle de certaines dispositions de
la Constitution, même si celle-ci n’entre
pas en vigueur (exemple: mise en place récente
de la Présidence de l’Eurogroupe). L’article
308 peut également être utilisé.
- soit l’utilisation des coopérations renforcées.
2- La
renégociation du Traité constitutionnel,
qui comporte plusieurs options :
- soit reproduire
le scénario danois ou irlandais (si
peu de pays disent non et que ce sont de « petits » pays)
: on ne modifie pas vraiment le Traité,
on fait des arrangements pour ces pays ;
- soit renégocier
vraiment le Traité, s’il
est rejeté par un « grand » pays
ou un grand nombre de pays. Il doit alors être
ratifié à nouveau par tous.
- soit n’appliquer de façon provisoire que
les dipositions du Traité qui ne posent pas
de problème particulier, en attendant une
solution pour les autres.
3- Le
retrait de l’Union est une dernière
possibilité :
- soit un retrait
individuel d’un pays ne souhaitant
plus être membre
- soit une exclusion
forcée des pays ne voulant
pas ratifier, mais ceci est juridiquement inacceptable.
- soit un retrait
collectif de pays voulant aller de l’avant dans le cadre de la Constitution pour
refonder ensuite ensemble une nouvelle Union: juridiquement
très acrobatique et hautement improbable.
Parmi ces options, la plus
probable est la renégociation
de la Constitution
Pour Bruno de Witte et Joseph
H. H. Weiler , c’est
le scénario le plus plausible. En effet, tous
deux estiment que les gouvernements ont investi trop
d’énergie et de crédibilité dans
ce projet pour ne pas tenter de le sauver. Il est très
peu probable qu’ils “passent l’éponge” et
se contentent de revenir à Nice. Ceci est d’ailleurs
conforté par la déclaration annexée
au Traité (déclaration 30), qui exprime
l’espoir que le Conseil européen sera à même
de trouver une solution en cas de crise de ratification
pour sauver le traité.
(*) L'institut ASSER est un institut
néerlandais "Institute
for private and public international law, international
commercial
arbitration and european law", dont voici l'adresse
http://www.asser.nl
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